A.K.A "la pince" !
Forcément, je vous parle de postures, donc je vous parle sanskrit !
J'inaugure un nouveau cycle d'articles consacrés aux postures que nous retrouvons souvent pendant les cours. Si vous avez besoin de quelques piqures de rappel sur les trois postures essentielles du Vinyasa Yoga, qui permettent justement de "faire un vinyasa", n'hésitez pas à relire les articles précédents.
Tous à l'ouest !
Paschimottanansana, ou étirer l'ouest de notre corps. "Paschimo" signifie "Ouest", par extension l'arrière du corps, car traditionnellement, les Yogis se tournent vers l'est et le soleil levant pour pratiquer. "Uttana", que l'on retrouve dans d'autres noms de postures, signifie "étirement intense" . Quant à "Asana", cela veut dire " posture de yoga". C'est pourquoi tous les noms sanskrits de postures se terminent donc par "asana", tout simplement.
Ces derniers jours, dans mes pérégrinations sur l'Internet, beaucoup de sollicitations m'ont invitée à me lancer dans l'écriture de cet article. Parmi elles : ma propre colonne vertébrale ! Ces dernières semaines, je ne m'autorisais pas à pratiquer cette posture à fond, parce que, pour la première fois de ma vie, j'ai eu un problème au dos.
Maintenant tout va mieux, après un deuxième passage dans les mains magiques d'une ostéopathe formidable, qui m'a à juste titre rappelé que nos blessures physiques nous aident à développer notre compassion : elle envers ses patients, moi envers mes élèves. Les limitations de notre propre corps nous aident à comprendre celles des autres, et l'attirail d'émotions qui va avec, la frustration en tête.
Etirer, relâcher et accepter.
Ses mots m'ont encore plus poussée vers cet article, car Paschimottanasana est une posture "classique", que nous pratiquons souvent en cours, mais une posture néanmoins intense et exigeante. Tout d'abord, il faut que les muscles de l'arrière des jambes soient souples pour être complètement réalisée : or, cette chaine musculaire, les ischios-jambiers, se révèle souvent très contractée pour beaucoup de personnes. En effet, la course à pied ou la nage, des activités sportives souvent pratiquées, sollicitent beaucoup ces muscles : par conséquent, ils rétrécissent. D'où quelques difficultés dans la réalisation de la fameuse "pince", puisque des ischios-jambiers trop raides empêchent la bascule - ou antéversion - du bassin, indispensable pour que le mouvement du tronc vers les jambes puisse s'effectuer.
Ensuite, le dos : dans cet asana, il faut d'abord travailler avec un dos DROIT. Droit au niveau des lombaires, droit au niveau des omoplates. Ne pas laisser le haut du dos s'arrondir, en tirant les omoplates l'une vers l'autre, n'est pas une chose facile quand on a tendance naturellement à avoir les épaules en pronation, c'est-à-dire tournées vers l'intérieur.
Enfin, vient l'Ego. Vous savez, cette petite voix pas très cool dans votre tête qui peut vous dire : " Vas-y ! vas-y ! Mais attrape tes orteils, bon sang ! ", " J'ai maaaal !!!" ou encore " Je n'y arrive pas, je suis nul(le) ... ". Votre Ego, d'une, vous le laissez à la porte du Shala ; de deux, s'il tente une percée intempestive, ignorez-le en vous concentrant sur votre respiration, et en acceptant que votre corps en soit là, ici et maintenant.
Avec la pratique, et avec aussi beaucoup de compassion envers vous-mêmes, vos progrès sont certains. Au Yoga, il n'y a pas de compétition, pas de comparaison ! Souvenez-vous que la première règle (yama) du Yogi est Ahimsa : la Non Violence.
Surtout, ayez bien à l'esprit que, en forçant l'étirement, vous ne gagnerez pas en souplesse plus rapidement ! Bien au contraire, vous risquez une blessure au niveau des tendons : les tendons ne sont pas élastiques, ce sont des tissus dits "yin", qui sont résistants à la traction. En revanche, si vous dosez l'étirement, et si vous pratiquez la posture avec régularité et douceur, vos muscles s'allongeront : la proportion de fibres élastiques dans les muscles augmentant, vous deviendrez plus souple. Doucement, mais sûrement !
La pratique de Paschimottanasana.
1. Commencez en Dandasana : assis(e), jambes tendues, pieds flexes, dos droit. Dès maintenant, tirez les omoplates l'une vers l'autre, comme si vous vouliez maintenir un crayon entre la pointe vos deux os, ou que vous vouliez que celles-ci se touchent. Puis, fléchissez vos genoux.
2. Inspirez. Levez les bras vers le ciel, biceps près des oreilles, bras tendus. Vos épaules doivent rester basses, poussez le sommet du crâne vers le ciel pour allonger votre nuque.
3. Allongez la colonne le plus possible, puis expirez et penchez-vous vers l'avant : gardez le dos bien droit, basculez votre bassin vers l'avant et travaillez de manière à rapprocher votre ventre de vos cuisses.
4. Laissez vos mains reposer là où elles viendront naturellement : les tibias, les chevilles, l'extérieur des pieds.
5. Si cela tire beaucoup à l'arrière des cuisses ou derrière le genou, gardez vos genoux pliés en gardant bien les pieds flexes, orteils tirés vers vous. Si vous sentez que vous pouvez aller plus loin, allongez un peu vos jambes. Si tout va bien, tendez complètement les jambes.
6. Utilisez votre souffle pour relâcher les muscles ischion-jambiers, et ne forcez pas.
7. Si le contact de votre ventre avec vos cuisses se fait facilement, que vous attrapez vos pieds et que vos jambes sont tendues, alors relâchez votre tête vers vos tibias après quelques respirations complètes. Pour continuer de travailler sans arrondir le haut du dos, écartez vos coudes vers l'extérieur, et tirez vos omoplates l'une vers l'autre.
Vous pouvez rester une dizaine de respirations dans la posture, soit une minute à une minute trente.
8. Pour sortir de la posture, sur une inspiration, tirez vos bras devant vous, fléchissez légèrement les jambes et remontez lentement avec le dos plat.
Purvottanasana , la contre-posture.
Après avoir étiré votre ouest, étirez votre est !
Vous pouvez aussi pratiquer la demi-posture, la "table inversée" avec les jambes pliées à 90° : c'est particulièrement recommandé si vos plantes de pieds ne sont pas entièrement au sol dans la posture complète.
Et pour aller plus loin, je vous laisse avec cet article, sur le blog 3heures48minutes, qui explique très clairement et simplement les bienfaits énergétiques de Paschimottanasana.
Très belle pratique à tous,
OM
Camille