En Sanscrit : Anjana, la mère d'Hanuman et Asana "posture".
Certaines postures semblent plus faciles à réaliser que d'autres, mais plus j'avance dans ma pratique, plus je me dis que quelque soit la simplicité apparente de tel ou tel asana, finalement il n'en est rien : il y aura toujours, que ce soit Savasana (la relaxation) ou Sirsasana (la posture sur la tête), une difficulté qui devra être affrontée avant d'être surmontée. Ce qui fera la différence sur le chemin, ce sont la régularité, la persévérance, la pratique. Et cela c'est toujours plus facile à dire / concevoir / réaliser qu'à faire/faire. Pour tout le monde.
Dans le cas d'Anajaneyasana, si elle paraît assez simple au premier abord, plus on avance dans sa pratique, plus on prend conscience de toutes les subtilités qu'elle requiert dans le placement du corps. Comme nous pratiquons bien souvent cette posture en cours en Vinyasa comme en Hatha, je me suis dit qu'un "instant posture" s'imposait.
Plusieurs variations sont possibles, suivant les possibilités du corps : à vous de voir celle qui sera la plus adaptée pour vous. Selon l'ouverture du bassin et des épaules, selon d'éventuelles douleurs aux genoux ... en observant votre corps, vous trouverez la variation qui vous convient. En cours, on a tendance à vouloir faire comme le groupe, mais vous devez choisir l'intensité qui est juste pour vous. Dans le respect de votre corps, et en respectant l'alignement : bien se placer, bien établir sa base est absolument essentiel pour profiter de tous les bienfaits de la posture, pour amener l'ouverture dans le corps, et ne pas se faire mal.
Dans Anjaneyasana, avant de lever les bras et d'avoir la colonne en extension arrière, il y a déjà beaucoup à travailler sur la base de la posture : les appuis doivent être solides, le poids bien réparti sur les deux appuis, le centre de gravité le plus bas possible ... Les bienfaits de cette posture sont nombreux : elle est très utile en cas de sciatique, elle étire les muscles des hanches, les quadriceps, les psoas, elle ouvre le bassin. Ainsi, elle soulage les douleurs dans le bas du dos : un bassin plus ouvert, moins de douleurs lombaires ! Et ensuite, une réaction en chaîne s'opère: le bassin est libéré, puis plus d'espace sera créé dans le diaphragme, la cage thoracique, la respiration peut devenir plus ample, et en respirant plus profondément, le pratiquant peut aller plus loin dans sa posture, jour après jour.
C'est une posture que j'aime beaucoup pratiquer, elle est donc souvent au menu, comme vous avez pu le constater ! Je la trouve superbe car elle agit en profondeur, et chaque pratiquant peut l'adapter selon son niveau de pratique ou ses fragilités.
Pratiquer Anjaneysana
1. A partir d'Adho Mukha Svanasana ( aka Chien tête en bas ), ramener le pied droit entre les mains, à côté de la main droite. Posez le genou gauche au sol. Le genou doit être dans l'alignement de la hanche, et au dessus de la cheville : celui-ci forme un angle droit. Les deux pieds doivent donc être écartés largueur des hanches. Si le pied avant ( ou le pied arrière ) sont trop peu écartés, cela créera un déséquilibre. Prenez le temps de regarder votre corps pour trouver l'alignement correct.
Observez aussi vos pieds : placez toujours l'intérieur des pieds parallèle aux bords longs du tapis, bien dans l'axe des genoux et des chevilles. Les pieds ne doivent pas tourner vers l'intérieur ou l'extérieur, pour vous permettre un appui ferme. Concernant la position du pied arrière, deux options sont possibles : vous pouvez garder les orteils retournés, ou les allonger, selon ce qui est le plus confortable pour vos genoux.
2. Veillez à ce que l'écart entre les deux pieds soit juste : si besoin avant de poser votre genou arrière au sol, reculez votre pied, puis posez le genou. Si les deux pieds ne sont pas suffisamment loin l'un de l'autre, alors le travail d'étirement dans les jambes et d'ouverture dans le bassin sera moins efficace. Si le genou est fragile, pliez le tapis sous le genou, ou encore placez votre pull ou votre couverture plié sous le genou. Autre option, pratiquer avec le genou décollé du sol : c'est plus intense pour les jambes, mais en cas de douleur importante, il faut bien choisir.
3. Une fois la base établie, concentrez-vous sur votre bassin. Laissez-le descendre vers le bas, et travailler l'étirement de l'avant de la cuisse arrière : trouvez une limite agréable, de manière progressive. Pressez le pied droit (le pied avant) dans le tapis, pour engager toute la jambe : ainsi vous renforcez les mollets et les ischio-jambiers, les muscles à l'arrière de la jambe, mais aussi la cuisse.
Il est important de faire ici une bascule du bassin, appelée rétroversion pour éviter de cambrer les lombaires. Pour cela, amenez le pubis vers l'avant, ou autre manière de le dire, dirigez le coccyx vers l'avant. La clé est de cambrer le dos le moins possible : allongez la colonne, grandissez l'avant du buste et dirigez le sommet du crâne vers le ciel afin de le garder le plus droit possible. Ramenez le nombril vers la colonne pour engager le ventre.
A ce stade, garder les mains sur les hanches est une bonne option afin de se concentrer sur le positionnement du bassin. La cuisse arrière est étirée profondément, et avec la pratique régulière et la respiration, le bassin peut descendre un peu plus.
Si vous aviez décollé le genou arrière, pour bien placer le bassin de manière à amener le dos droit, vous pouvez plier la jambe arrière, rétroverser le bassin puis tendre la jambe arrière et dirigez votre talon vers le sol.
4. A présent, les bras ! Choisissez la variation qui vous convient : une règle commune, détendez vos épaules. Pratiquez dans la bienveillance, progressivement.
- bouts des doigts au sol ou mains sur des briques, quand il est difficile de redresser le dos.
- mains sur les hanches, pour rester concentré(e) sur le bassin.
- mains en Namasté, pour vous rappeler d'ouvrir l'avant du corps et diriger le sternum vers le haut.
- mains vers le ciel, bras tendus largueur des épaules, biceps aux niveau des oreilles, comme si vous teniez un gros ballon au dessus de la tête, regard vers l'avant ou vers le haut selon la confortabilité au niveau des cervicales. Le dos est droit. Cette variante est à privilégier si on ressent des tensions dans les épaules, si celles-ci manquent encore d'ouverture.
- mains jointes, vers l'arrière, biceps au niveau des oreilles, regard vers le haut. La colonne est en extension arrière, et celle-ci s'effectue à partir de la cage thoracique. Modulez l'intensité de l'extension selon votre confortabilité : c'est OK de ne pas vouloir aller loin certains jours ! Ecoutez-vous.
Cette dernière variation correspond à la posture finale. Certaines personnes très souples viennent attraper la cheville de la jambe arrière (oui oui c'est une option !).
5. Pour sortir de la posture, ramener les doigts sur le sol, puis prendre appui sur les mains pour venir dans dans Adho Mukha Svanasana (ou dans une planche pour faire un vinyasa).
Le chien tête en bas est une excellente contre-posture, il est recommandé de la garder quelques respirations (cinq minimum) avant de pratiquer du côté gauche.
Le corps a une mémoire, laissez-lui du temps pour intégrer et digérer la pratique. Au début, s'ajuster, s'installer dans la posture demande beaucoup de concentration, et souvent il est difficile de rester ancré dans sa respiration car les sensations intenses dans le corps peuvent perturber. Mais au fur et à mesure que le corps s'ouvre et intègre la posture, grâce à la pratique régulière, il devient plus facile de ressentir son souffle, mais aussi les sensations internes, la contraction du plancher pelvien, l'énergie qui remonte dans le centre. C'est ce que j'aime par dessus tout avec la pratique du Yoga, c'est qu'on n'en finit jamais d'apprendre. Cet article est le fruit de ma pratique, et certainement que dans quelques années, j'aurais des choses à ajouter ou à rectifier, car mon corps et ma compréhension de celui-ci auront encore évolués.
Très belle pratique à vous et à bientôt sur le tapis !
OM
Camille